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mardi 13 février 2024

La grève

 

La grève

Les grèves et luttes syndicales

Les grèves ont secoué les installations minières de tout temps avec des revendications souvent identiques : les salaires et les conditions de travail. Mais les grèves n’ont pas toutes eues le même impact et les mêmes répercussions sur les Compagnies minières ou les ouvriers.

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Les premiers mineurs qui osèrent défendre les intérêts des autres furent chassés par les Compagnies qui ne voulaient pas de syndicats et d’agitateurs. Par le biais du carnet du mineur, les mineurs ne retrouvaient pas de travail dans les autres fosses ou les autres Compagnies. La photographie ajoutée au carnet a déjoué bien des fraudes.

Grève Anzin

Ces mineurs expulsés ouvraient souvent un estaminet proche de la mine pour continuer à aider leurs anciens camarades. Ces cafés devinrent rapidement les grands centres de lutte et de contestation face aux compagnies minières.

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Rapidement; les mineurs s’organisent en syndicats qui les défendent et leurs droits grandissent : conditions de travail, salaires, retraites, avantages en nature mais aussi la garantie de conserver son travail en étant syndicaliste ou gréviste.

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grève Arenberg 1936

La grève est possède une spécificité chez les mineurs. Cette  grève est souvent massive, avec le soutien familial. Les grèves sont tendues et les situations restent sur le fil proche de la révolte. Cela est dû au regroupement des ouvriers en corons mais aussi à l’extrême difficulté et à la dangerosité du travail.

Les principales grèves :

25 germinal an 2 dans le boulonnais pour du savon et du pain.

1848 contre les chevaux

1855 Bruay pour ne pas payer la poudre à buquer

1856 Leforest refus de payer la caisse de secours

1872 Dourges Anzin Salaires-Travail

1877 Meurchin Salaires

1885  Fosse Mulot contre l’ingénieur

1889 Bassin Suppression des longues coupes

1891 Bassin Salaires

1890 Courrières, Drocourt Carvin Dourges Salaires

1893 Fosse 3 Liévin contre l’emploi des Belges

1893 Bassin Salaires

1901 Bassin Salaires-Travail

1906 Bassin Salaires-Travail suite à la catastrophe de Courrières

1913 Bassin Salaires-Travail

1919 Bassin Salaires-Travail

1936 Bassin semaine de 40h 15 jours de congés payés

1940 Bassin protestation à l’envahisseur

1948 Défense du statut du mineur

1963 Revendications salariales

1968 Bassin Salaires-Travail

jeudi 25 janvier 2024

100 000 mineurs en grève dans le Bassin minier

 

100 000 mineurs en grève dans le Bassin minier

Un mécontentement grandissant

Texte manuscrit, écrit sur une page de cahier d'écolier, où on lit "Unissons-nous pour le front national de lutte pour l'indépendance de la France. Passons à l'action. Nous vaincrons. Vive la France libre, indépendante. À bas le fascisme semeur de misère. Fédération Jeunesses Communistes".

Le charbon du bassin minier du Pas-de-Calais est, dès le début de l’Occupation, l’objet d’enjeux économiques considérables.

Appartenant à la zone interdite, le département est rattaché comme celui du Nord au commandement militaire de Bruxelles ; placées sous tutelle de l’Oberfeldkommandantur 670 de Lille, les compagnies minières doivent accroître à tout prix leur production au profit de l’Allemagne, au mépris des conditions de travail et de sécurité des ouvriers.

Les acquis sociaux obtenus sous le Front populaire sont clairement remis en cause. L’hiver de 1940-1941 est particulièrement rude pour les populations. La misère, la disette, le froid et les conditions de travail qui se dégradent créent chez les mineurs un fort climat de mécontentement.

Lorsque, le 1er janvier 1941, l’occupant allemand décide d’allonger d’une demi-heure la journée de travail sans augmentation de salaire, l’exaspération est à son comble et entraîne la multiplication des grèves perlées. À cette grogne sociale s’ajoute un profond dégoût envers la politique de collaboration menée par les compagnies.

Les conditions de vie des mineurs et de leurs familles, rendues pénibles par les difficultés de ravitaillement et la mise en place des cartes de rationnement (rations manifestement insuffisantes et qui ne sont même pas respectées à la distribution), ainsi que le fort sentiment national provoqué par l’Occupation, forment dès lors un terreau favorable au Parti communiste français clandestin qui crée un "Front national" ouvert à tous les courants politiques.

Texta manuscrit sur lequel on lit "Uni comme en 36. Vive la grève".

Dès le 1er mai 1941, des mouvements sociaux s’organisent autour des comités d’unité syndicale et d’action (CUSA). Drapeaux rouges et tricolores sont suspendus aux fils électriques, des milliers de tracts sont distribués, des cahiers de revendications sont rédigés dans tout le bassin minier. L’agitation s’étend même jusqu’en Belgique et touche les sidérurgistes et l’industrie textile. Mais une action d’une plus grande ampleur se prépare. La colère est à son paroxysme lorsque les compagnies tentent d’imposer la réintroduction du paiement des mineurs à l’abatage par équipe. La grève éclate à la fosse 7 des mines de Dourges, dite du Dahomey, le matin du 27 mai, à l’instigation du délégué mineur Michel Brulé et d’Auguste Lecœur, puis s’étend rapidement aux fosses voisines, les autorités n’en ayant pas mesuré l’ampleur.

Plus de 80 % de grévistes

Triangle de feutre retourné où on lit "tout faire contre Hitler". Ce message est entouré d'un grand V bleu et au centre, on reconnaît le marteau et la faucille communistes en rouge (ainsi que le mot "contre").

Le 3 juin, l’ensemble du bassin minier est touché. Sur les 143 000 mineurs recensés, 100 000 ont cessé le travail, soit près de 80 %. La grève générale est très largement encouragée par les femmes, qui organisent des cortèges à l’entrée des fosses pour en bloquer l’accès, et exhortent les non grévistes à rejoindre leurs camarades. Elles manifestent devant les bureaux des compagnies minières avec à leur tête Émilienne Mopty, une femme de mineur et militante communiste.

Les autorités allemandes n’hésitent pas à utiliser les armes ou des pompes à incendie contre ces "mégères", comme elles les appellent. Sous le commandement du général Niehoff, chef de l’Oberfeldkommandantur, elles mettent en œuvre des mesures de répression particulièrement dures. Le 5 juin, on compte déjà plus de 200 arrestations. Les compagnies établissent des listes de meneurs ; l’occupant frappe aussi au hasard et procède à des arrestations arbitraires.

C’est un véritable climat de terreur qui s’abat sur la population. Les hommes comme les femmes sont emprisonnés à la caserne Kléber de Lille, transformée en camp d’internement. Le bilan de cette "grande grève" est extrêmement lourd : 450 personnes ont été arrêtées, sur lesquelles 244 mineurs sont déportés en Allemagne (130 d’entre eux y trouveront la mort), certains sont fusillés.

Une répression sanglante

Affiche sur fond orange d'un texte imprimé, en allemand sur la partie gauche et en français sur la partie droite : "Oberfeldkommandantur 670, der Oberfeldkommandant. Avis. Suivant jugement rendu ce jour par le Tribunal de guerre de l'Oberfeldkommandantur (V) 670, les mineurs français, dont les noms suivent, ont été condamnés chacun à 5 ans de travaux forcés pour avoir participé à la grève des mineurs, et s'y être comportés en meneurs. Ceci en violation de l'ordonnance du commandant en Chef de l'Armée concernant l'introduction du droit pénal allemand et des prescriptions pénales dans les territoires occupés de la France, en date du 13 Juin 1940, en corrélation avec le paragraphe 4 du droit pénal spécial pour le temps de guerre (Kriegssonderstrafechtsverordnung) : Louis Florecq, Georges Houliez et Augustin Desort de Montigny-en-Gohelle, Lucien Douchez d'Hénin-Liétard, Isidore Lobel de Noyelles-Godault, Roland Evrard de Courrières, Alfred Brulin de Courrières, Robert Defachelle, Julien Charles et François Deroeux d'Hénin-Liétard, Louis Debailleul de Montigny. Ont été, en outre, condamnées par le même Tribunal pour s'être comportées en meneurs, lors de ladite grève : Femme Michalinie Bowenczack, d'Ostricourt, à 2 ans de travaux forcés, Femme Florence Guettier, d'Ostricourt, à 3 ans et demi de travaux forcés. Lille, le 3 Juin 1941. L'Oberfeldkommandant et Président du Tribunal : Signé : Niehoff, Generalleutnant".

Pour faire cesser la grève au plus vite, le général Niehoff décide, en outre, de suspendre le paiement des salaires et de ne plus distribuer les cartes de ravitaillement. L’argent manque et, très vite, la peur et la faim entament le moral des grévistes. Les privations et la fermeté de la répression ont finalement raison du mouvement. Le 10 juin, les mineurs reprennent le travail. Ils obtiennent tout de même quelques réponses à leurs revendications sociales : pour calmer les esprits, les autorités d’occupation décident une légère augmentation des salaires, des rations de viande et de savon supplémentaires ainsi que des vêtements de travail.

Mais cette grève, avant tout patriotique, est par son ampleur l’un des premiers actes de résistance à l’occupant. L’économie de guerre allemande a été fortement touchée : près de 500 000 tonnes de charbon ont été perdues. Le Parti communiste clandestin, à l’origine de ce mouvement, est dès lors perçu par les Allemands comme un ennemi à abattre.

Texte dactylographié sur lequel on lit "La Vie Ouvrière. Numéro spécial. 08/06/1941. Les mineurs et similaires vont reprendre le travail !!!! Lundi, les mineurs et similaires reprendront le travail après 12 journées de lutte pour arracher leurs revendications. Nous saluons le courage admirable des travailleurs, la combativité des femmes et de la jeunesse française dans cette bataille contre le capitalisme. Tous se sont battus jusqu'à la dernière limite, face aux manoeuvres du patronat minier, aux mesures policières des autorités occupantes, à la trahison reformiste et à leur poison répandu au cours de la grève. Ils ont combattu sous la terreur et la menace de la faim par le refus des billets de quinzaine. Non, les travailleurs et leurs ménagères ne sont pas vaincus, ils relèveront la tête ; leur exemple restera vivant dans l'histoire du mouvement ouvrier et pour les batailles futures. Dans les puits, dans les ateliers, ils resteront étroitement unis dans les syndicats. Avec autant de force ils réclameront la libération des emprisonnés et l'aboutissement de leur cahier de revendications. Plus que jamais serrons-nous les coudes et nous finirons par vaincre le capitalisme affameur et fauteur de guerre !!!

Plusieurs des meneurs ont échappé aux arrestations et sont entrés en clandestinité. Émilienne Mopty en fait partie. Elle habite la cité du Dahomey de Billy-Montigny, point de départ du mouvement. Militante communiste, elle a déjà participé aux grèves de 1933-1934. C’est donc tout naturellement qu’elle prend la tête des femmes qui manifestent devant les bureaux des compagnies minières à Hénin-Liétard et Billy-Montigny. Elle entre ensuite en résistance et rejoint le groupe Charles Debarge, alors que son mari est déporté en Allemagne. Elle transporte des armes et joue un rôle important chez les FTP. Arrêtée une première fois, elle parvient à s’évader mais, fin septembre 1942, elle est envoyée en mission à la citadelle d’Arras où elle doit s’attaquer à un peloton d’exécution. Arrivée au rendez-vous, elle est attendue par la Gestapo, mise au courant de son action. Arrêtée, elle subit la torture et est atrocement mutilée. Condamnée à mort, elle est décapitée à Cologne le 18 juin 1943. Avant de mourir, elle entame le chant de l’Internationale.

Né à Courrières en 1914, Michel Brûlé est mineur au puits 7 du Dahomey en 1941. Militant communiste, il tient un rôle essentiel dans le déclenchement de la grève. Il entre lui aussi dans la clandestinité pour échapper à la répression, rejoint également Charles Debarge et est notamment l’un des organisateurs de l’attaque de la poudrière de Beaumont-en-Artois, le 23 septembre. Il est arrêté en octobre à la suite d’une dénonciation. Emprisonné à Loos, il subit durant des semaines des séances de torture, mais ne parle pas. Condamné à mort, il est fusillé le 14 avril 1942 avec trente otages. Il a dans la poche un billet où il a écrit "courage et espoir".

Cahier de revendications des ouvriers des fosses n° 9 et 17 de Courrières

Texte manuscrit transcrit ci-contre.

"Camarades"
Voici le cahier de revendications, qui a été déposé au
Délégué mineur du Puit n° 17.
Si la situation l'exige, nous en déposerons un semblable auprès de M. l'ingénieur du n° 9 ou de la direction des
Mines de Courrières.

Revendications des ouvriers, Fosse n° 9 et n° 17 de Courrières

  1. Arrêt des poursuites pour faits de grève et libération des ouvriers arrêtés (fosse Duhamel de Dourges).
  2.  Ravitaillement mieux assuré, notamment pour le pain, la viande
    et les pommes de terre ; augmentation de la portion de pain, celle-ci
    pourrait être portée à 800 gr. pour chaque ouvrier ; augmentation du
    savon : 500 gr. de savon mou et une savonnette par semaine ; augmenta-
    tion des tickets et portion de margarine.
  3. Augmentation des salaires, sur la base de l'ouvrier, en rapport
    à l'augmentation du coût de la vie. Diminution du coût de la
    vie par application de mesures contre les fauteurs de vie chère et
    respects par les municipalités même, des prix de divers[es] denrées alimentaires.
  4. Reclassement des démobilisés, retour de captivité et obtention
    d'un rappel.
  5. Revendication des mêmes avantages : carte M.T., carte spéciale
    de margarine et de savon, etc. pour les ouvriers du jour, comme ceux du fond.
  6. Bénéfice du paiement de la mère au foyer pour nos camarades
    étrangers.
  7. Cessation des brimades : amendes, heures en bas, étiquettes [...].
  8. Paiement des 2 semaines d'évacuation.
  9. Paiement de la demi-heure supplémentaire.
  10. Hausse de la retraite des ouvriers mineurs.
  11. Réembauchage des ouvriers Dewauchelle F. et Storser Paul.