Trois manifestations de cette fin d’année m’ont été signalées et méritent votre visite. Elles prouvent que l’attachement à l’histoire de la mine et des mineurs est toujours aussi important dans notre pays minier.
Au 17ème siècle, il faisait partie du Grand Chemin d’Arras à Lens et se terminait à la Porte d’Arras (au niveau aujourd’hui du croisement des rues Decrombecque et de la Paix).
Au 18ème, il prend le nom de Grand Faubourg puis plus tard, après la construction des écoles Condorcet et Campan et de l’Institution Michelet, il devient le Boulevard des Ecoles.
Depuis le 7 avril 1928, il se nomme ‘Boulevard Emile Basly’. Pour nos parents (et même encore pour certains aujourd’hui), c’était simplement ‘le boulevard’.
– Lieu de rassemblement autant pour les 15 000 mineurs écoutant le discours d’Emile Basly, leur Maire Délégué lors des grèves de 1906 ou les milliers de supporters vêtus de sang et d’or lors de sa remontée par les Champions de France 1998.
– Lieu d’études pour ceux qui, comme moi, passèrent plusieurs années ‘à Michelet’ à suivre les cours de professeurs inoubliables tel Christian Daubresse.
– Lieu de rendez vous pour les mineurs et de leurs familles lors des consultations médicales dans l’immense dispensaire de la Caisse de Secours des Mines.
– Lieu de promenade et de shopping pour ses nombreux commerces : on pouvait y trouver aussi bien une mobylette ou un fusil de chasse chez Carpentier qu’un costume trois-pièces chez Blondeau en passant par les montres de chez Roussel, le Paris-Primeur, la Poissonnerie Moderne, les oiseaux de chez Europrix ou encore les landaus de La Renommée des Voitures d’Enfants sans oublier, bien sur les Nouvelles Galeries, précurseur des supermarchés qui allaient bientôt s’élever en périphérie des villes.
- Lieu de détente et de souvenirs car c’est ce boulevard qu’arpentait notre bande de copains et copines le dimanche soir après la séance de cinéma à l’Apollo. Un arrêt obligatoire de toute l’équipe au n°118, au ‘Basly’ de chez Monsieur Pénin : menthe à l’eau pour les filles, demi-pression pour les garçons ; dans une ambiance enfumée par nos paquets de Royales ou de Françaises, certains flirtaient, d’autres se disputaient des parties de baby-foot au son des tubes de Claude François, de Johnny, des Beatles ou de Polnareff que diffusait le juke-box.
C’était ‘le Boulevard’, c’était le début des années 70 à Lens.
A suivre, quarante cinq clichés retraçant plus de cent ans de la vie du ‘Boulevard’.
Il fut un temps où les compagnes des présidents de la République Française n’assuraient pas leur notoriété en grattouillant une guitare ou en envoyant des tweets.
Il fut un temps où les compagnes des présidents de la République Française méritaient de par leur comportement et leurs actions le titre de ‘Première Dame de France’.
Ce fut ainsi le cas de Madame Vincent Auriol, née Michelle Aucouturier. Fille d’un ouvrier verrier, créateur d’une entreprise coopérative où tout le monde est ouvrier et tout le monde est patron. Elle-même membre de la SFIO, elle épouse à 16 ans un jeune avocat, rédacteur en chef du ‘Midi Socialiste’ nommés Vincent Auriol.
Lorsque son mari est élu Président de la République en janvier 1947, Michèle Auriol ne veut pas se contenter de jouer les potiches. Elle est très active dans le domaine social et ouvre les portes du Palais de l’Elysée à tous les français, quelque soit leur rang.
C’est donc sans surprise que cette ancienne résistante accepte en 1951, à l’invitation du Maire de Lens Ernest Schaffner, de venir parrainer l’année suivante les fêtes du Centenaire du début de l’exploitation charbonnière dans la capitale du pays minier.
Ces fêtes dureront deux semaines encadrées par des spectacles au stade Bollaert (voir l’article sur les fêtes de Lens en 1952
Le 15 juin dans la matinée, la ‘Delage’ dans laquelle a pris place Madame Auriol arrive à Lens. Paul Ribeyre Ministre de la Santé publique et de la Population l’accompagne. Elles est accueillie par Georges Phalempin, Préfet du Pas de Calais, Ernest Schaffner, Maire de Lens et Jean Michaux, Directeur du Groupe Lens-Liévin des HBNPC.
La journée ne fut pas des plus reposantes pour Madame Auriol. La matinée commence par l’inauguration du nouveau centre médico-scolaire de la rue Arthur Lamendin puis elle se rend Route de Béthune où elle procède à une autre inauguration, celle du grand complexe du centre de Formation des Mines de Lens et de sa ‘mine-image’.
Puis Madame Auriol se rend au centre médico-social pour y saluer deux des dernières femmes à avoir été mineurs de fond. Après le déjeuner officiel offert par la municipalité, le cortège officiel se rend au stade Félix Bollaert où sera donné un spectacle réalisé par les enfants des écoles de Lens.
Madame Auriol est accueillie par vingt mineurs médaillés du travail qui lui font une haie d’honneur. Selon la presse de l’époque, l’épouse du Président de la République porte un tailleur gris et un chapeau ‘bois de rose’ garni de noir.
Ce fut d’abord les fillettes des écoles des cités 4, 9, 11, 12 et Berthelot qui miment la chanson du Petit Quinquin. Puis les garçons de l’école Carnot, habillés en mineurs, retracent les différentes activités du travail de la mine.
C’est ensuite le tour de trois groupes de jeunes filles des centres d’apprentissage des mines qui, habillées de bleu, de blanc et de rouge, rendent hommages aux trieuses, ces femmes de la fosse.
Arrive alors le tour des filles de l’école Campan. Elles effectuent plusieurs danses représentant les loisirs des mineurs au cours des quelles elles évoquent les combats de coqs, La Napoule, les parties de belote et le jardinage.
Enfin, la principale représentation de ce spectacle est constituée des mouvements d’ensemble effectués par un millier d’écolières lensoises et dirigés par M. Vermeesch, Responsable du service d’éducation physique à la ville de Lens.
La presse n’hésite pas à souligner l’enthousiasme de Madame Auriol »qui se lève plusieurs fois pour applaudir’ et qui possède »l’art de gagner tous les cœurs par son charme discret et sa gentillesse souriante ».
En fin d’après midi, la Delage emporte Madame Auriol vers Paris en traversant les rues de la ville pavoisées, ovationnée par les famille de mineurs à qui »elle répondait simplement d’un signe de la main ».
Anciennement rue du Rivage puis Rue de la Porte de Lille, cette artère lensoise, l’une des principales de la ville, se nomme depuis 1946 et une décision du Conseil Municipal d’Auguste Lecoeur, Maire communiste de Lens de l’époque, ‘Rue René Lanoy’.
Mais pour les gens de ma génération et beaucoup d’autres encore aujourd’hui, on l’appelle toujours la ‘rue de Lille’.
Alors, en trente photographies et sans aucun commentaire, revivons plus d’un siècle d’histoire de la
Rue de Lille