sur ce blog:VILLE LENS ,LES MINES62/59:RCL se trouve les anciennes photo de lens etant enfant de lens et les photo des fosses et travail de mon pere qui etai mineur:FIER DE CETTE VILLE ET METIER DE MON PERE,inscrit a la protection DMCA .com à mon site blog et si quelqu'un vole un de mes contenues pour mettre sur son blog ou site web, avec lui j effectuerai le service de suppression des sites et blogs copieurs ainsi que les serveurs bloqueurs: SUR MON SITE BLOGS FACEBOOK LENS ,MINE SOUVENIR VOUS Y TROUVERAI LA MEME CHOSE A L IDENTIQUE QUE SUR BLOGGER ET GOOGLE

Share this

social

dimanche 18 août 2024

Le chemin Manot

 


CM001

   Bien connu à Lens par les habitants des cités 11,12 et 14, le chemin Manot reliait à l’origine Souchez à Vendin par le nord de Liévin et de Lens.

   C’est au 17ème siècle qu’il fut créé par un certain Manot, intendant du roi Louis XIV. Pendant la guerre de Trente Ans, quelques années avant la victoire de Condé à Lens,  les troupes françaises encerclèrent à plusieurs reprises la ville occupée par les Espagnols. Alfred Bucquet nous apprend dans son livre ‘Lens, son passé, ses houillères’ que les armées françaises étaient cantonnées dans des camps décrivant un arc de cercle sur les hauteurs de Vendin, Lens et Liévin.

   Le chemin Manot permettait de relier ces garnisons entre-elles en évitant de s’approcher des remparts de la ville.

   Sur cette carte de Lens en 1823, il est repéré (en rouge) sous le nom de ‘chemin de Pont-à-Vendin à Souchez’. La ville de Lens fortifiée figure en bleu.

CM002

   Alfred Bucquet nous précise ensuite que le chemin Manot ne resta qu’un simple chemin de campagne jusqu’à la seconde moitié du dix-neuvième siècle et les débuts de l’exploitation charbonnière.

  Le chemin Manot devient alors en un axe où l’on trouve à la suite les fosses des mines de Lens. A Liévin, la fosse 3 dans la cité Saint-Amé, puis aux limites de Lens les fosses 11 (cité Saint Pierre) et 12 (cité Saint Edouard) sur le territoire de Loos-en-Gohelle. Le chemin Manot frôle au nord la fosse 14 de Lens (cité Saint Laurent) et se termine dans la cité Saint Auguste de Vendin et sa fosse 8.

CM003

   On en trouve aujourd’hui encore l’origine à Souchez avec ce que l’on appelle le Chemin de Lens.

CM004

   Le chemin Manot arrive à Lens en provenance de Liévin en passant par le carrefour de la Belle Femme puis la ‘barrière du 11’ (le passage à niveau près de la halte de Liévin).

CM005

   Il entre alors dans la cité 11 dont il longe les corons par le sud. Là se trouvait avant le début de l’exploitation charbonnière une des plus grandes fermes de la région. Cette portion du chemin Manot s’appelle depuis le 11 juin 1964 rue Léon Blum.

CM006

   Le chemin Manot franchit ensuite la route de Béthune au niveau du carrefour Plumecocq puis entre dans la cité 12 jusqu’au cimetière nord après avoir traversé le Grand Chemin de Loos. Ce secteur porte maintenant le nom de rue Pierre Brossolette.

EPSON scanner Image

   A l’extrémité de la rue Brosssolette, il passait sous le pont du chemin de fer des mines devant l’entrée du cimetière nord et continuait vers la route de La Bassée par ce qu’on appelle aujourd’hui la rue Louise Michel.

CM008

   Il traverse ensuite la route de La Bassée

CM008 bis

   Le chemin Manot se frayait un chemin entre les champs, dans ce qui n’était pas encore la zone des Renardières.

CM012

    Remplacé de nos jours par les rues des Renardières et de l’Abbé Jerzy Popiéluszko, l’ancien chemin Manot a été coupé à deux reprises au nord de Lens pour laisser place à la rocade minière.

CM010

   C’est dans ce secteur que se trouvait le centre d’approvisionnement et la ferme des Mines de Lens près du bois Rigault.

CM011

   Après avoir traversé le chemin de Béthune à Douai à Vendin-le-Vieil, le chemin Manot entre dans le bois des Houillères devenu le parc de loisirs des Faitelles.

CM013

   Ce n’est qu’après qu’il retrouve enfin son nom d’origine, sur une petite portion qui pénètre dans la ville de Vendin-le-Vieil  et se termine à la hauteur de la rue du 8 mai.

CM014


    Il y a quelques temps, j’avais publié un article sur Narodowiec. Dans celui d’aujourd’hui, beaucoup de choses ont été précisées, de nouveaux documents apparaissent. Cette nouvelle version n’aurait pas été possible sans l’aide importante de M. Jean-Claude Kasprowicz qui a connu le journal jusqu’au jour de l’arrêt des publications. Voici donc l’histoire de NARODOWIEC, le journal lensois des mineurs polonais.

narodowiec-logo

   Enfant des corons de Lens, mes copains s’appellent Dupont, Caboche ou Renard mais aussi Michalak, Budchinski, Lewandowski, Stachowiak ou Tchaikowski. Lens et le bassin minier ont toujours été une terre d’accueil pour ces étrangers. Je ne parle pas des Espagnol ou des Prussiens, venus chez nous pour y faire la guerre mais des vrais immigrés du début du vingtième siècle : les polonais.

  Au tout début du vingtième siècle, après la terrible catastrophe des mines de Courrières de 1906 qui tue onze cents mineurs, le besoin de main d’œuvre dans l’industrie charbonnière est urgent. Arrivent alors dans le bassin minier les premiers ouvriers westphaliens d’origine polonaise en provenance de la Ruhr allemande. Ces immigrés ne sont pas acceptées par tous : certains syndicats protestent même auprès des compagnies qui emploient de la main d’œuvre étrangère sous-rémunérée et revendiquent ‘la préférence nationale’. Après la Première Guerre Mondiale, une nouvelle vague de travailleurs polonais arrive et s’intègre à la communauté minière. Entre 1920 et 1925, on estime à environ quarante mille le nombre d’ouvriers immigrés de ce pays.

   Les Polonais ont leurs pratiques, leurs églises, leurs commerces, leurs musiques, leur cuisine et même leurs banques. Dès 1920, ils créent leurs propres coopératives tenues par des femmes d’ouvriers…. Petit à petit, ils s’intègrent dans le bassin minier et partagent rapidement avec les lensois au point de se confondre rapidement dans la société et d’y devenir indispensables.

provisoireStEdouard3

   Si l’histoire de Lens est celle que l’on nous narre aujourd’hui, c’est aussi parce qu’elle a été faite avec les polonais, et ce pas seulement pour la gloire du RCL (rappelez vous entre autre, Placzek, Budzinski, Biéganski, Sowinski, Kosso, Théo puis plus tard les frères Lech, Krawczyk, Zuraszek, etc…).

6263

   La communauté polonaise lensoise a son journal : Narodowiec, (le Nationaliste). Ce quotidien sort de l’imprimerie du 101 de la rue Émile Zola à Lens. Narodowiec, qui est le symbole de la Pologne à Lens, devient incontournable dans le bassin minier. Il est entièrement écrit en langue polonaise et dans ses meilleures années publié à près de soixante mille exemplaires par jour. Il est alors le second quotidien régional derrière ‘La Voix du Nord’.

journaux

   Narodowiec n’est pas né à Lens. C’est le 2 octobre 1909, à Herne, dans le bassin minier de la Ruhr allemande et où vivent de nombreux ouvriers étrangers polonais que Michel Kwiatkowski fait paraître le premier numéro de Narodowiec… en langue polonaise. A cette époque, la Pologne, qui a été désintégrée par les russes, les allemands et les austro-hongrois pendant plus d’un siècle, n’existe plus sous forme d’état indépendant et la langue polonaise est interdite.

kwiatkowski pere

   Né en 1883 à Gniezno (Pologne Prusienne) d’une famille de petite noblesse, Michel François Kwiatkowski se lance dès l’âge de quinze ans dans la lutte pour l’indépendance de la Pologne en adhérant à une société secrète. Il devient journaliste après ses études de droit. En 1903, il entre à la Gazeta Gdanska (le journal de Gdansk) puis devient rédacteur en chef à Niarus Polski. C’est un nationaliste convaincu, un résistant contre le deuxième Reich. Il est condamné à plusieurs reprises pour ses idées et victime de tentatives d’assassinat.

   L’empire allemand prend la parution de Narodowiec comme une provocation dénoncée aussi par la presse germanique mais comme le succès est immédiat, il n’ose en interdire la diffusion de peur de provoquer des émeutes. Cependant, les faits et gestes du fondateur du journal sont surveillés de près. Dès les premiers numéros, de nombreux polonais devenus allemands par la force des choses achètent ce journal et y retrouvent le plaisir de lire la langue maternelle.

   Pendant la première guerre mondiale, un moment interdit comme toute la presse polonaise, Narodowiec est autorisé à reparaître à la condition de diffuser les communiqués de guerre allemands. Les articles de Kwiatkowski lui valent d’être de nouveau arrêté et emprisonné à la citadelle de Wesel (Rhénanie du Nord).

 wesel2

  A la fin de la Première Guerre mondiale, l’indépendance de la deuxième république de Pologne est proclamée. Michel François Kwiatkowski se rend en Haute-Silésie pour défendre la cause polonaise pendant la campagne du plébiscite décidé par le Traité de Versailles sur la répartition des régions entre l’Allemagne et la Pologne. Lors des élections législatives de novembre 1922, Kwiatkowski et son épouse deviennent députés démocrates-chrétiens à la Diète de Silésie. Ils le resteront jusqu’en 1927.

   Mais la Pologne renaissante doit affronter le gros problème du chômage, véritable plaie, qui menace la stabilité du nouvel état. La France a besoin de main d’œuvre pour relancer  l’extraction minière. C’est la période de la migration de nombreux ouvriers vers les mines du nord de la France. Dès 1922, Kwiatkowski leur fait parvenir Narodowiec par la poste militaire française.

   En 1924, autorisé à s’installer en France en raison des services rendus à la cause des nations alliées, Michel Kwiatkowski rejoint les ouvriers polonais dans la capitale du Pays Minier. Il y amène son matériel d’imprimerie dans un convoi militaire français et s’installe rue Émile Zola. Le 12 octobre de la même année sort des rotatives lensoises le premier exemplaire de Narodowiec tiré à sept mille exemplaires. En Pologne, un journal de même tendance, Narod parait de 1924 à 1939 sous la direction de Marian Kwiatkowski, le frère de Michel. Marian sera assassiné sur ordre des autorités allemandes en 1940.

 camion

  En France, Narodowiec va vite prospérer : quinze mille exemplaires en 1926, vingt-huit mille en 1928, trente-cinq mille en 1932 et plus de quarante mille à la veille de la deuxième guerre mondiale. Largement distribué à Lens, Narodowiec est lu aussi dans les mines du Gard, du Tarn, de l’Aveyron, de Lorraine où il est vendu par correspondance.

  En 1932, l’imprimerie de Lens édite la revue illustrée ‘Illustacja Polska’ qui est diffusée à neuf mille exemplaires. Elle éditera également la ‘Gazeta dla Kobiet’, un journal féminin catholique.

autres journaux 

   Narodowiec est considéré comme sans tendance politique mais franchement anti-communiste. Il a toujours dénoncé l’introduction de la politique dans la communauté polonaise contrairement à ‘Wiarus Polski’, un autre journal polonais imprimé depuis 1923 sur les rotatives du Grand Echo du Nord à Lille et dont Jan Brejski, le directeur, ne cache pas son appartenance au groupe national-ouvrier polonais.

   En 1926, un nouveau concurrent parait, imprimé aussi à Lille, ‘Glos Wychodzcy’ (La Voix de l’Émigré) dirigé par Antoni Ryczkowski mais il n’arrivera pas à rivaliser avec Narodowiec.

 concurents2

   Avant la seconde guerre mondiale, l’ensemble des journaux constituant la presse polonaise en France tire à plus de cent vingt mille exemplaires. Outre Narodowiec et Wiarus Polski, on trouve Prawo Ludu (Le Droit du peuple) et Robotnik Polski (La Voix de l’ouvrier). Afin de pouvoir être lue par un maximum de leurs ressortissants, ils sont tous écrits en polonais.

   Les articles de Narodowiec sont tous écrits par des journalistes locaux qui rapportent les évènements de la communauté polonaise. Ils répondent aux besoins des lecteurs qui y voient un moyen de conserver l’identité de leurs origines. Narodowiec donne aussi des conseils aux polonais de Lens et de la région : contrat de travail, assurances de santé ou de retraite, demande de logements, procédures pour obtenir des documents officiels ou la naturalisation française… Le journal prend aussi la défense des travailleurs polonais : il dénonce les bas salaires, les discriminations et s’en prend aux compagnies minières. Ainsi, dans les années trente, il demande à ces compagnies et au gouvernement français des assurances afin que les nouveaux embauchés venus de Pologne ne soient pas licenciés puis expulsés en cas de baisse de la production comme cela a déjà été fait auparavant. En ce qui concerne la Pologne, Narodowiec s’oppose clairement à la politique autoritaire menée par le maréchal Pilsudski et ses successeurs.

   Les liens qui unissent Narodowiec à la population polonaise du bassin minier sont si étroits que des mineurs qui ne lisaient jamais de journal dans leur pays achètent maintenant ce quotidien pour rester en contact avec ‘leur’ monde. Parmi  ces mineurs immigrés, certains sont encore illettrés et se font lire le journal par un ami ou un membre de la famille. On estime que chaque exemplaire est lu par quatre personnes au moins.

   En 1932, l’imprimerie du numéro 101 de la rue Émile Zola emploie cinquante personnes afin que les exemplaires quittent chaque jour les rotatives à l’heure dite.  En 1936, parmi les journalistes on trouve pour la première fois une femme : Stanislawa Koslowska.

   Le 1er septembre 1939, l’armée allemande pénètre en Pologne. Narodowiec lance un appel afin de créer une armée polonaise en France. Le général Wladyslaw Sikorski forme à Paris un gouvernement polonais en exil aussitôt reconnu par les pays libres. Michel Kwiatkowski est nommé membre du Conseil National.

W Sikorski

   Il cesse la diffusion du journal dès que les troupes germaniques envahissent Lens en mai 1940. Recherché par la Gestapo, il part pour l’Angleterre retrouver le général Sikorski qui s’y est réfugié après la défaite française.

  Dès les premiers jours suivant la Libération de Lens, les membres de l’organisation de lutte pour l’indépendance de la Pologne reprennent l’imprimerie de la rue Zola afin de relancer le journal qui reparait en décembre 1944 après le retour de Michel Kwiatkowski.

equipe3

  Narodowiec reprend son rang d’institution régionale. Il propose jusque trente-deux pages écrites par une véritable équipe de journalistes passionnés de leur nation d’origine. On peut y lire des nouvelles de tout le nord de la France, de Paris, de la France entière, du Benelux et y trouver également toutes les rubriques d’un quotidien ‘normal’ : politiques, sociales, financières, agricoles, médicales, culturelles. Il comporte également le courrier des lecteurs, un feuilleton, des bandes dessinées dont les aventures de Rafala Pigulki dessinées par André Daix connu en français sous le nom de Professeur Nimbus. Narodowiec est lu dans tout le bassin minier mais aussi vendu par correspondance à des abonnés de toute la France et même de l’étranger.

carte

   Dans la seconde moitié du vingtième siècle, quatre-vingt personnes sont employées à l’imprimerie de la rue Émile Zola pendant six jours et six nuits afin que le journal respecte ses horaires de distribution. Les bureaux de la rédaction ouvrent dès six heures et à quatorze heures, un véhicule transporte les journaux dans les gares de Lens et d’Arras tandis que dans les corons de Lens, deux cents colporteurs les mineurs distribuent aux familles polonaises dès la fin de l’après-midi ‘leur Narodowiec’ daté du lendemain ! D’autres personnes sont chargées d’imprimer tracts et documents pour des commerçants, des artisans ou même des particuliers.

imprimerie

   Tous les enfants d’immigrés polonais se souviennent de Narodowiec :

         -  Mon grand-père le lisait et moi, petite, je trouvais que c’était un drôle de journal.

       – C’est dans ce journal que j’ai commencé d’abord à lire le polonais avant de rentrer en maternelle française, mes parents y étaient abonnés il y a plus de quatre-vingt ans.

       – Narodowiec… Grande aide à l’apprentissage du Polonais en ce qui me concerne, aussi ! Mes parents le recevaient également, car nous vivions en région parisienne ! A sa disparition, il nous a manqué !

       – Dans Narodowiec, moi je regardais surtout les vignettes de Rafal Pigulka (Professeur Nimbus) avec son grand chapeau et son froc à queue de pie, vu que j’étais furieusement réfractaire à l’apprentissage de la lecture du polonais.

nimbus

        – J’aimai également regardé les bandes dessinées de Nimbus et les titres des reportages comme par exemple Echa Dnia (les échos du jour) avec lesquelles j’apprenais le polonais avec mon père…

         – Dans les années soixante mon grand-père et ma grand-mère Babtia lisaient Narodowiec surtout le soir. Ils se partageaient les pages. On n’avait pas la télé et moi je lisais la petite bande dessinés Pigulki. Un souvenir merveilleux de mes grands parents.

    En 1959, Narodowiec fête son cinquantième anniversaire. Parmi les nombreux messages reçus à la rédaction figure celui de John Kennedy, Président des Etats Unis.

   En 1962, Michel François Kwiatkowski qui décédera d’un accident à Vichy le 21 mai 1966 à l’âge de quatre-vingt trois ans laisse la direction du journal à son fils Michel Alexandre aidé de son épouse Eliana.

kwiatkowski junior

   Michel Alexandre Kwiatkowski, diplômé des universités de Cambridge (économie politique) et de Lille (lettres), poète et écrivain (on lui doit deux livres consacrés au pape Jean Paul II), effectue rue Émile Zola ses premiers pas de journaliste.

    Démocrate chrétien comme son père, il s’opposera autant au gouvernement polonais en exil à Londres qu’au régime communiste de Varsovie.

   A partir des années soixante-dix  la récession de l’exploitation charbonnière et la disparition progressive des premières générations d’immigrés polonais font que les ventes diminuent. Les jeunes générations parlent moins la langue de leurs parents et sont plus intéressés par une télévision en plein essor que par la presse écrite. Narodowiec n’est plus tiré qu’à trois mille exemplaires et l’imprimerie n’est plus rentable. Michel Alexandre doit finalement abandonner. Le dernier numéro sort des rotatives lensoises le lundi 19 juillet 1989 et les locaux de la rue Zola fermés.

    Vingt ans plus tard, lors de l’exposition sur le centenaire de la première parution du journal, l’association des Amis de Narodowiec déclare : ″Le journal reste une véritable fenêtre à travers laquelle les générations futures peuvent regarder pour ne pas oublier ce siècle de l’horreur″.

briquet3


   Cette place porte le nom du grand homme politique français depuis 1936 et une décision du conseil municipal d’Alfred Maës.

   Vers 1570, on la nomme rue ou place du Grand Marchié puis elle devient la ‘rue Très Large’ vers 1750.

   Le 30 octobre 1909, elle est baptisée ‘place Francisco Ferrer’ en mémoire du républicain espagnol fusillé quelques jours plus tôt par la monarchie ibérique. Il arrive parfois que certains lensois l’appelle aussi ‘place de la mairie’.

  La place a certainement vu le jour avec la construction de l’église Saint Léger. Sur les plans de Lens du moyen-âge, on peut voir qu’elle a toujours été l’une des artères principales de la commune. Du temps des remparts, elle donnait directement sur la Porte d’Arras (qui se situait au niveau du croisement entre l’Avenue du Maréchal Joffre et les rues Decrombecques et de la Paix).

  Avant la première guerre mondiale, elle n’était qu’une large avenue dans le prolongement du boulevard des écoles. Elle fut élargie lors de la reconstruction de la ville à partir de 1919.

  Deux édifices ont toujours existé au niveau de cette place : la mairie et l’église Saint Leger. Depuis le dix-neuvième siècle, est cernée de nombreux commerces.

  La place principale de Lens a été le témoin de nombreux évènements.

      – En 1906, c’est là qu’ont lieu les grands rassemblements ouvriers pendant la grève qui a fait suite à la catastrophe des mines de Courrières.

      – En 1914, c’est là aussi qu’un officier allemand vint annoncer à Emile Basly la prise de la ville par les troupes impériales germaniques.

      – En août 1944, la place Jean Jaurès et les édifices qui l’entourent sont de nouveau détruits par les bombardements. Quelques semaines plus tard, le général de Gaule prononce un discours sur la place Jean Jaurès devant un  hôtel de ville en ruine.

      – En 1965, plusieurs milliers de lensois se regroupent sur la place pour rendre un dernier hommage à leur maire décédé, le docteur Ernest Schaffner.

      – En mai 1998, ils sont encore nombreux à se masser sur la place Jean Jaurès pour voir les joueurs de l’équipe de football de Lens qui sont pour la première fois champions de France.

   La place a aussi toujours été le lieu de nombreuses manifestations festives ou sportives comme les défilés à l’occasion des fêtes de Lens ou du passage du tour de France.

   Alors, parcourons l’histoire de cette place lensoise avec plus de 50 images en noir et blanc.

PJ1001 (1)PJ1001 (2)PJ1001 (3)PJ1001 (4)PJ1001 (5)PJ1001 (6)PJ1001 (7)PJ1001 (8)PJ1001 (9)PJ1001 (10)PJ1001 (11)PJ1001 (12)PJ1001 (13)PJ1001 (14)PJ1001 (15)PJ1001 (16)PJ1001 (17)PJ1001 (18)PJ1001 (19)PJ1001 (20)PJ1001 (21)PJ1001 (22)PJ1001 (23)PJ1001 (24)PJ1001 (25)PJ1001 (26)PJ1001 (27)PJ1001 (28)PJ1001 (29)PJ1001 (30)PJ1001 (31)PJ1001 (32)PJ1001 (33)PJ1001 (34)PJ1001 (35)PJ1001 (36)PJ1001 (37)PJ1001 (38)PJ1001 (39)PJ1001 (40)PJ1001 (41)PJ1001 (42)PJ1001 (43)PJ1001 (44)PJ1001 (45)PJ1001 (46)PJ1001 (47)PJ1001 (48)PJ1001 (49)PJ1001 (50)PJ1001 (51)PJ1001 (52)PJ1001 (53)

Il y a 70 ans, Lens sous les bombes

 


   Dans quelques jours sera célébré le triste soixante-dixième anniversaire du premier bombardement de Lens de la seconde guerre mondiale.

   1944 : la ville de Lens totalement anéantie lors de la première guerre mondiale doit nouveau du subir les conséquences de la bêtise humaine. Ces femmes et ces hommes qui ont déjà perdu une trentaine d’années auparavant  des parents, des amis vont de nouveau pleurer les leurs.

   En 1944, les ‘frappes chirurgicales’ n’existent pas et pour être à peu près sur d’atteindre l’objectif fixé, il faut élargir la zone à bombarder. Du mois d’avril au moins d’août, cinq bombardements importants ‘visant’ les installations ferroviaires feront plus de 500 morts et de nombreux blessés. On dénombrera plus de mille habitations totalement détruites. Près de quatre mille autres irréparables devront être rasées.

depot avril 1944

   Le premier raid a lieu dans la nuit du 20 au 21 avril vers 23h30.175 avions-bombardiers de la RAF ont pour mission de détruire le dépôt de locomotives de Méricourt.  C’est la cité des Cheminots d’Avion qui est principalement touchée mais de nombreux dégâts sont recensés à Sallaumines, Méricourt et Lens. On relèvera 204 civils tués et plus de deux cents blessés.

001 avril cite des cheminots

   Dans la nuit du 10 au 11 mai, à 23 h30  nouvelle attaque contre le dépôt des machines du chemin de fer faisant une soixantaine de victimes dans les communes de Lens, Avion, Méricourt et Sallaumines. Cette fois, ce sont 125 appareils qui larguent 532 tonnes des bombes explosives et 2 tonnes de bombes incendiaires. Les calculs ne devaient pas être excellents puisque le dépôt a très peu souffert, les projectiles tombant pour la plus part au sud des voies ferrées.

002 avril lens

   Neuf jours après le débarquement sur les plages de Normandie, l’aviation anglaise pilonne de nouveau le secteur de Lens dans la nuit du 15 au 16 juin. La RAF vise encore le dépôt avec pour objectif affiché d’empêcher l’arrivée de troupes de renfort allemandes. Cette fois, ils ne sont pas moins de 220 avions à pilonner le secteur pendant dix-sept minutes.

   Les militaires jugent ‘la cible touchée avec précision’ mais les dégâts sont considérables en ville : mairie, église Saint Leger, école Sainte Ide, place de la République. Les bombardements vraiment très peu précis ont touché une vaste zone allant de la gare Sainte Elisabeth et du pont Césarine jusqu’au pont de Douai et au cimetière-est. Plus de 300 maisons sont inhabitables.

003 lens juin 44 2005 lens juin 44 rue paris004 lens juin 44 rue Paix

   C’est aussi la première fois que les ‘alliés’ utilisent des bombes à retardement qui, en explosant jusqu’à plusieurs jours après leur largage, font de nombreuses victimes parmi la population. Ce raid fera 38 tués civils à Lens.

   Le 4 août dans l’après-midi, ce sont cette fois six appareils américains qui larguent plus de seize tonnes de bombes sur le triage de Lens dans le cadre d’une opération visant les rampes V1 et les batteries allemandes du Pas-de-Calais. 25 nouvelles victimes seront relevées dans Lens et au moins autant de blessés.

008 coron 11 aout 44

  Enfin, il y a le bombardement du vendredi 11 août 1944, celui dont les anciens de Lens se souviennent encore comme si c’était hier. Les militaires de la RAF lancent une nouvelle attaque sur le dépôt de Lens. Selon certains témoignages, on apprendra plus tard que ce bombardement était inutile car les allemands avaient déjà quitté le dépôt des machines et abandonné les installations ferroviaires.

   A Lens le temps est radieux, il n’a pas plu depuis longtemps. Beaucoup de lensois sont sortis de chez eux ; c’est le jour de la ‘quinzaine’ dans les corons. Les dernières nouvelles remontent le moral de la population, les troupes alliées avancent, la libération tant attendue est proche.

   Vers 16h15, les sirènes hurlent, les lensois se précipitent vers les abris. Aussitôt, les premiers obus tombent sur la ville. Plus de 130 bombardiers sont utilisés. A 16h38, tout est terminé. Lorsque les habitants remontent des abris, il fait noir comme en pleine nuit.

  Selon certains historiens, c’est la poussière dégagée par les premiers bombardements qui aurait aveuglé les pilotes suivant leur faisant rater leur objectif principal et larguer un bon nombre de leurs bombes sur la ville au lieu du triage ferroviaire. Pourtant, Augustin Viseux, dans son livre ‘Mineur de fond’ est formel : dès la première vague, des bombes tombent sur la cité et la fosse 4.

006 lens cité 4 aout 44007 lens ste barbe 11 aout 44

   Les installations du triage sont détruites, certes, mais aussi une grande partie de la ville. Le centre de l’agglomération est de nouveau dévasté, les bombes sont tombées de place de la République à l’église Sainte Barbe de la cité 4, des grands bureaux des mines à la place de la gare…

012 reu paris 11 aout 44

  Lens n’a plus de mairie, n’a plus de caisse d’épargne, n’a plus de piscine, a perdu de nombreux commerces, des églises, des corons, un cinéma, la banque de France….

009 mairie aout 1944

010 caisseepargne

011 place jaures 11 aout 44

013 carrefour bollaert

014 ruethiers

   Le nombre officiel de morts s’élève à 144. Les corps seront rassemblés dans une chapelle ardente installée dans la salle des fêtes de la maison syndicale, rue Emile Zola.

   Le chiffre de 114 victimes est en dessous de la vérité car de nombreux corps seront retrouvés par la suite dans les décombres ou dans les caves et d’autres habitants seront tués par ces fameuses bombes à retardement.

   Parmi ces victimes figurent de nombreux mineurs de la fosse 4 et des ouvrières de la coopérative des mines qui se trouvait rue Bollaert. Dans la cité 4 s’élève aujourd’hui une stèle en l’honneur des victimes civiles et au jardin public de Lens, une autre rappelle les noms des victimes de la coopérative des mines.

   monuments

   Trois semaines plus tard, le 2 septembre 1944 l’armée anglaise entre triomphalement dans Lens.


    La mémoire est une fonction du cerveau très compliquée. Pourquoi un souvenir stocké pendant des années ressurgit un jour à la simple vue d’un document, d’un objet ou d’une image ? C’est ce qui m’est arrivé il y a peu de temps. La découverte, au service des archives municipales de Lens de la photo d’une ancienne salle d’opération de l’hôpital Schaffner a fait revenir à la surface l’histoire totalement véridique ci-dessous.

1001

   Les années cinquante touchent à leur fin. Dans un coron de la cité de la fosse 14, un petit garçon a mal au ventre depuis plusieurs jours. Sa maman décide de faire quérir le médecin des mines.

   Le docteur Montagne arrive, son éternelle cigarette vissée au bec. La maman explique : ″Mal au ventre, vomissements, température…″.

   Le docteur fait allonger le garçon sur la table de la salle à manger et l’ausculte. Son verdict : ″Appendicite, opération, hospitalisation.″ Il s’assoit, allume une nouvelle cigarette et rempli les papiers.

   Quelques jours plus tard, le petit garçon est couché dans une chambre à deux lits de l’hôpital cher au Docteur Schaffner. Il n’a pas peur, il est plutôt impressionné par toutes ces personnes en blouse blanche qui s’occupent de lui. Dans le lit voisin, un autre garçon, un ‘vieux’ de treize ou quatorze ans qu’il connait de vue. Il doit être aussi de la ‘fosse 14’.

1003

   Le lendemain, deux hommes en blancs viennent chercher le petit garçon, le couche sur un chariot, le sangle, le conduisent à travers les couloirs de l’hôpital, prennent les ascenseurs.

1004

   Le petit garçon est installé dans une grande salle bizarre où on l’allonge sur une table. Une énorme lampe est allumée au dessus de lui et l’éblouit. Une dame lui parle gentiment, lui fait une piqure dans le bras. Au revoir…  il dort.

1002

   La suite, c’est sa maman qui lui a raconté beaucoup plus tard. Le jour de l’opération, dès l’heure du début des visites autorisées, elle arrive dans la chambre. Le lit du garçon est défait, les couvertures jetées de travers. Où est-il ? Elle interroge son voisin de lit. ″Ils l’ont repris, son cœur s’est arrêté de battre !″. La maman a les jambes coupées, elle s’effondre sur le lit !

   On vient vite la rassurer, le garçon va bien. Il a eu un problème au moment de se réveiller et est en salle de réanimation. Peu de temps après, il est de retour dans sa chambre et se demande pourquoi tant d’agitation et de larmes autour de lui. On ne saura jamais ce qui s’est passé. On apprendra plus tard qu’au moment de lui ouvrir le ventre, un cas urgent est arrivé et que son opération a été retardée de quelques heures. Est la cause du malaise ?

   Aujourd’hui, le petit garçon est devenu vieux mais quand il passe devant l’entrée de l’hôpital de Lens, sur la route de La Bassée, il se souvient qu’un jour ici, il a fait pleurer sa mère ……

1005

   C’était à Lens à la fin des années cinquante !