Les Maires de Lens du 20è Siècle : Emile Basly (2)
BASLY, l'homme politique lensois :
Au début des années 1890, l'homme politique prend souvent le pas sur le syndicaliste. Ainsi en 1894, il adhère au groupe socialiste de la Chambre des Députés pour en démissionner un an plus tard ! Pourtant, en 1898, c'est de nouveau sous l'étiquette socialiste qu'il se représente aux élections législatives. On a entendu à l'époque dire de lui qu'il changeait de vêtements dans le train reliant Paris à Lens afin d'avoir une tenue appropriée pour ne pas choquer ses électeurs en arrivant sur les quais de la gare de Lens.
Dessin du Journal l'Illustration en 1884
De plus en plus politique et de moins en moins syndicaliste, Basly s'oppose même à son ami Florent Evrard. On lui reproche de plus en plus son attitude trop autoritaire au sein du syndicat.
En mai 1900, face à Eugène Courtin son prédécesseur, Emile Basly est élu Maire de Lens. Basly Premier Magistrat de la ville, c'est l'image de Lens qui va changer.
Basly en 1900 (dessin du Progrès Illustré)
A l'époque, Lens n'est qu'un gros bourg où sont implantées de nombreuses fermes mais la ville compte près de 25 000 habitants avec les constructions de corons en périphérie.
Les corons du Grand Condé vers 1900
Basly va moderniser la commune pour qu'elle réponde aux besoins de cette population grandissant rapidement suite à l'essor des Compagnies Minières. Développement du réseau des égouts, réfection de la voirie, création de groupes scolaires, de crèches, d'un hôpital et d'un hospice pour les personnes âgées (administré par Florent Evrard).
Basly veut que l'on soit heureux à Lens : de nombreuses manifestations et festivités ont lieu comme les grandes fêtes organisées pour le couronnement des Muses de 1901 et 1913 ou les Fêtes de la Gymnastique de 1905 et 1907. Sous Basly, Lens est devenue la Capitale du Pays Minier et son Maire sera surnommé: 'Le Tsar de Lens'. Cela contribue à sa popularité : en 1906, il est réélu Député sans problème avec 12 330 voix sur 17 880 votants.
Basly avec la Muse des Mineurs de 1901
Basly décide de se concentrer plus sur sa ville qu'à son action syndicale bien qu'il soit toujours à la tête du 'Vieux Syndicat'.
Vieux syndicat pourquoi ? Parce que c'est en 1902 qu'un dénommé Broutchoux arrive à Lens et forme avec Goudemetz un syndicat révolutionnaire dans les mines appelé aussitôt le 'jeune syndicat'. Jusqu'en 1907, ce sera une lutte haineuse entre les deux organisations ouvrières comme le prouve ces extraits du journal 'L'Action Syndicale' des amis de Broutchoux.
Journal action syndicale
Cela ne l'empêche pas en 1902 d'être réélu Député avec 15225 voix contre 792 à son adversaire Norange et les dirigeants du vieux syndicat ne restent pas inactifs. Ils réclament même dès 1903 la nationalisation des houillères.
1904, Basly est réélu sans problème Maire de Lens. Sur sa liste, on trouve Casimir Beugnet, Florent Evrard, François Huleux, Alfred Van Pelt, ses compagnons de lutte mais aussi Lucien Duvet, brasseur Place du Cantin, Victor Lefebvre 'rentier' qui vit des loyers de ses 28 maisons lensoises, Arthur Masquelier, un des plus gros entrepreneur de la ville, Fernand Popot, le plus grand épicier de Lens ou encore Auguste Hoëlle, grand architecte. Quatre de ses colistiers avaient fait parti de l'équipe d'Eugène Courtin lors d'un précédent mandat.
L'épicerie de Fernand Popot se trouve en face du café Carpentier, siège du syndicat des Mineurs
Cela déclenche de nouveau la haine des membres du 'Jeune syndicat'. Le 'Vieux Syndicat' des Basly, Lamendin, Evrard, etc... est accusé de n'en vouloir qu'aux cotisations des mineurs et de connivences avec les Directions des Compagnies Minières. Les adhérents du vieux syndicat sont surnommés 'les baslycots'.
Caricature parue dans 'L'action Syndicale' en 1908
Les 12 et 13 juin 1905 sont deux jours de grandes fêtes à Lens. Emile Basly inaugure le monument en l'honneur de G. Decrombecque sur la Place du Cantin et la Maison des Associations, Boulevard des Ecoles. A cette occasion, il fait venir à Lens les ministres radicaux Jean Bienvenu-Martin et Joseph Ruau à qui il offre un banquet de 500 convives. Puis, après leur avoir adroitement fait tenir des promesses sur les réformes des retraites des mineurs, les emmène à la fête de la gymnastique sur la Place Verte. Le poète mineur Jules Mousseron figure aussi parmi les invités.
La statue Decrombecque, la rue de la Gare lors de la fête
La Maison des Associations, la tribune officielle
En 1906, c'est la catastrophe de Courrières, Emile Basly joue un rôle très important dans la grève qui suit bien que coincé entre son rôle de Maire avec ses devoirs vis à vis de Clémenceau et ses responsabilités de leader syndical. Dès le 14 mars, premier jour de la grève, Basly se met au service des mineurs pour lesquels il tente de négocier avec les Compagnies en prenant à témoin les autorités. Il fait de nombreux aller-retours entre Lens et Paris et effectue après chaque voyage un compte rendu à la foule constituée par les mineurs en colère. Au Parlement, il réclame en vain la déchéance des dirigeants de la Compagnie de Courrières.
Basly rend compte de ses entretiens devant la Mairie de Lens
Cependant la grève tourne mal, de nombreuses violences sont commises et Clémenceau décide d'envoyer les troupes à Lens pour tenter de ramener le calme , ce qui ne fera qu'exacerber encore plus les mineurs grévistes, surtout ceux du jeune Syndicat de Broutchoux.
Les troupes arrivent à Lens
Finalement la grève est un quasi-échec : peu de propositions ont été acceptées par les Compagnies et les mineurs, affamés, reprennent le travail fin avril, déçus. De nouveau, on en veut beaucoup à Basly et à son syndicat.
Il s'oppose toujours au jeune Syndicat et est tenu responsable du peu de résultats obtenus à la fin du mouvement. Il refuse la réunification des deux syndicats décidée au niveau national ; le syndicat du Pas de Calais vit alors isolé pendant plus de deux ans. Après que certains amis de Basly aient rejoint la CGT en 1908, il faudra attendre 1911 la réunification. Le nouveau siège se trouve alors à la Maison Syndicale de Lens.
La Maison Syndicale
Réélu à la Chambre lors des élections des 24 avril et 8 mai 1910 avec 15 739 voix contre 6210 à Rouzé, Basly serpente entre ses rôles de Maire de Lens et de député qui l'obligent à avoir de bonnes relations avec les notables comme les Directeurs des Compagnies Minières et le syndicalisme où il se doit de venir en aide et de soutenir les mineurs dans leurs revendications. La ville continue de se moderniser. L'Hôtel de Ville, qui a d'abord été agrandi avec l'achat par la ville de la ferme Roussel mitoyenne et la modification du perron...
… a ensuite été démoli pour faire place à un nouveau bâtiment commencé en 1912 mais qui ne sera jamais terminé.
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