Les femmes dans les mines
Au début de l’exploitation minière, les femmes comme les enfants travaillaient au fond où elles étaient employées comme herscheuses, pour tirer les wagonnets.
C’est dans le Nord-Pas-de-Calais et la Belgique que les femmes ont été employées au fond en plus grand nombre : on estime ente 4000 et 5000 femmes travaillant dans la région au début du XIXe siècle. Ces femmes ont été immortalisées par Zola dans Germinal avec le personnage de Catherine Maheu.
L’interdiction du travail des femmes au fond date du 19 mai 1874 (1) pour des raisons de pénibilité et, dans l’Europe puritaine, de promiscuité avec les hommes.
Les jeunes filles employées au fond qui assurent un revenu indispensable à la famille, vont se retrouver à rejoindre celles qui travaillent au jour comme trieuses. On les embauchait dès l’âge de 12 ans et jusqu’à l’arrivée des tapis roulant effectuaient un travail pénible charriant le charbon dans des paniers en osier. Elles sont habillées d’une blouse bleue ou noire et, pour se protéger des poussières, elles sont coiffées d’un foulard qui leur a donné leur nom dans les mines du nord de la France : les cafus.
Dans cet extrait des Mémoires de la mine de Jacques Renard , une ancienne trieuse Mme Jankowiak, commente en compagnie d’Alice et Jean Baptiste Ooghe un document datant de 1921.
On y voit le décagement , c’est la sortie de la cage qui remonte du fond des berlines pleines de charbon (appelées “balles” en langage minier) et qui arrive à la recette du jour. L’opération est effectuée manuellement par un homme car l’effort nécessaire pour faire rouler cette charge de plus d’une tonne est important. Il est à noter que le film a été tourné dans une fosse équipée de voies ferrée à la recette. A cette époque, beaucoup de fosses ne possédaient que des plaques métalliques sur laquelle roulait la berline ce qui rendait son guidage plus pénible.
Les jeunes filles attrapent la berline pour l’emmener vers l’installation de culbutage composée d’un genre de tonneau tournant appelé “culbuteur”. Elles manœuvrent le culbuteur pour retourner la berline et vider le chargement de charbon. Puis la berline est ramenée vide vers le puits pour prendre la place d’une berline pleine et retourner au fond pour être chargée de nouveau. Dans le film , le côté encagement des berlines vides n’est pas équipé de rails, les jeunes filles les poussent sur des tôles, car vides, elles se manœuvrent plus facilement.
Ce lieu de travail s’appelle la recette du jour ou le moulinage. A l’étage inférieur, le chargement des berlines culbutées est réceptionné sur un tapis roulant qui se dirige vers le triage où d’autres femmes sont occupées au tri du charbon brut afin d’enlever toutes les impuretés telles les pierres, les morceaux de bois ou de métal qui sont mélangés au charbon .
Le travail au triage est le plus éprouvant car il s’effectue dans le bruit et la poussière , l’hiver dans le froid et l’été dans la chaleur. Il fallait un œil exercé pour distinguer des schistes du charbon, ce dernier étant plus brillant. Mais dans ce lieu sombre et empoussiéré, ce n’était pas un exercice facile . A l’époque des Compagnies, le travail était contrôlé par des surveillants qui n’hésitaient pas à mettre à l’amende en cas de découverte de résidus dans le tri. Toutes ces opérations étaient effectuées sans gants de protection.
D’autres femmes étaient employées à la mine , notamment dans les lampisteries où elles distribuaient les lampes aux mineurs avant la descente. Elles étaient chargées aussi de les récupérer. Pendant longtemps ça a été un moyen de contrôle de la remontée du mineur.
Elles étaient chargées également de l’entretien et du nettoyage de ces lampes. Ces femmes nommées “lampistes” effectuaient une fonction plus valorisante et considérée par les mineurs car du bon entretien des lampes, dépendait la qualité du travail au fond.
Avec la disparition des lampes au profit des lampes chapeau, puis de la généralisation des lavoirs à charbon dans lesquels le charbon est trié, calibré (criblage) et lavé automatiquement, les emplois féminins disparaissent à l’exception des employées de bureau ou des emplois d’infirmières ou dans les œuvres sociales.
Les jeunes filles qui ne souhaitent pas passer par les centres de formation ménagers des Houillères pour devenir femmes de mineur, trouvent un moyen de subsistance et d’indépendance en allant travailler dans les usines textiles de Lille-Roubaix-Tourcoing.
Dans à le fin des années 70 avec le début du déclin de l’industrie textile qui s’accompagne de la récession dans les mines et la fin de l’exploitation, l’emploi féminin dans le bassin minier devient un des enjeux de la reconversion.
Dans les premiers temps des mines, les femmes étaient employées sous terre pour tirer les wagonnets de charbon.
Les femmes ont été embauchées dans les mines sur des métiers ne
demandant aucune qualification. A la fin uniquement au jour au triage,
elles étaient cafus.
Mais au XIX ème siècle, elles travaillèrent
également au fond, comme en témoigne d’ailleurs le personnage de
Catherine Maheu dans le Germinal de Zola. Cette pratique était courante
en Belgique où le manque de bras avait fait accepté le travail des
femmes, des jeunes filles surtout, au fond comme herscheuses (chargement
et roulage des berlines). En France la pratique s’installe au début du
XIX ème siècle.
En France les toutes dernières femmes à avoir travaillé au fond étaient une bruaysienne Elise Lheureux née en 1860 et Julie Dudoignon née en 1862, qui commença à Vermelles.
Elise Lheureux commençât en 1873 à 13 ans, elle travailla au fond à la fosse 3 de Ferfay. Elle fut victime d’un éboulement et resta 3 jours ensevelie avec plusieurs autres ouvriers. Elle fut sauvée par son père, aidé d’un groupe de sauveteurs, qui travaillait dans la même taille.
Julie Dudoignon commença aussi à 13 ans et connut la dure vie du fond pendant 8 ans à Vermelles, puis à Marles, Bully les Mines et Hersin Coupigny.
Ces deux femmes travaillèrent jusque vers 1882 au fond.
La loi interdisant le travail des femmes au fond sera votée le 13 décembre 1889.
elise lheureux
Par la suite, c’est essentiellement en surface que l’on trouve les emplois féminins.
Jeunes trieuses
Pour la plupart, il s’agit de femmes ou de jeunes enfants qui trient le charbon de la terre avant le chargement.
Dès l’âge de 12 ans les filles sont embauchées comme trieuses. Il y a 400 trieuses dans les mines de bruay. On imagine le nombre total de femmes employées dans les mines !
Elles veillent à ce que les gaillettes ne se cassent pas, balaient la poussière sous les tapis roulants. Elles portent des paniers de 50kg, plus tard des sacs.
Elles sont méprisées et rudoyées par le surveillant
Certains vont
jusqu’a ramener un caillou qu’ils ont trouvé dans leur charbon ce qui a
pour effet de mettre les trieuses à l’amende. (1 franc ce qui à l’époque
représente une journée de nourriture.
Ce tri était fait à l’origine avec une grande pelle et des paniers en osiers, puis ensuite sur des tapis roulants. C’est un travail dur, demandant beaucoup de résistance. Pourtant les femmes s’affairent par tous les temps, chaussées de sabots et coiffées d’un fichu pour se protéger de la poussière de charbon.
Houilleuses en costume de travail à Wigan ( Angleterre)
Les femmes ont travaillé dans les mines et ont occupé plusieurs metiers :
elles étaient rouleuses, hiercheuses* ou trieuses,
- hiercheuses = femmes employées dans les mines où elles poussaient les wagons ou berlines )
femmes employées au triage
beaucoup d’entre elles ont travaillé à la lampisterie.
les femmes ont longtemps travaillé à côté des hommes, tant au fond qu’au jour. Sous terre, leur rôle se limite au chargement et au transport des produits extraits . En surface, sur le carreau, elles exécutent différentes tâches allant de l’entretien des lampes et le nettoyage des bains-douches à des travaux plus lourds et insalubres liés au triage et au lavage des minerais et du charbon ainsi qu’à la mise à décharge des stériles.
Dure journée pour ces femmes !
Cependant, le métier féminin le plus emblématique est incontestablement celui de la lampiste.
Ces jeunes femmes encadrées par le chef de la lampisterie ont la lourde responsabilité de distribuer et de récupérer en début et en fin de chaque poste, les lampes à benzine, outil d’éclairage indispensable au mineur de fond.
lampistes evin
Les lampistes d’Evin-Malmaison
Tâche importante, puisqu’au même titre que la taillette, une lampe qui n’est pas rangée dans son emplacement numéroté sur les étagères de rangement, signifie implicitement que le mineur n’est pas remonté du fond.
Elles ont également à charge, l’entretien des lampes qui doivent avoir un fonctionnement irréprochable au fond ; tâche ardue nécessitant une bonne connaissance du matériel puisque chaque lampe était composée de plus de cent pièces différentes…
montage lampe
La femme quand elle ne travaille pas à la mine, est toujours présente aux côtés du mineur. C’est elle qui se lève à 4 heures du matin pour préparer le café fort du mineur, c’est elle qui prépare le briquet ( casse croûte) qu’il prendra à la pause, c’est elle qui frottera son dos meurtri quand il se lavera dans le grand baquet au retour de ses 10 heures de fosse.
C’est aussi la femme du mineur qui gère le budget du ménage. Ce sont
également lesf femmes de mineur qui entretiennent les grèves quand la
situation devient trop difficile. Et puis ne l’oublions pas, c’est elle
également qui élevera seule ses enfants.
Quand elles quittent la
mine, souvent après leur mariage c’est pour s’occuper de leur ménage et
vivre joiurnellement dans la hantise qu’un accident survienne au fond et
leur enlève leur mari et enfant(s).
scène de vie chez un mineur
A la fin du XIXe siècle, des lois ont progressivement interdit, dans tous les pays européens, le travail des femmes au fond de la mine, non seulement en raison de la dureté du travail mais aussi en raison d’une promiscuité homme/femme que la morale de l’époque réprouvait. Paradoxalement, les nouveaux droits des femmes et les lois édictées dans le cadre de l’égalité des sexes pourraient, aujourd’hui, autoriser le retour des femmes à la mine !
Avec cette page consacrée au travail des femmes dans les mines de charbon, l’association ” le 8 d’Evin” souhaitait que personne n’oublie que les jeunes filles et les femmes, parfois mères de famille avaient également largement contribué à la ” Bataille du charbon”. Le film GERMINAL montre combien la femme du mineur était impliquée tant par son travail au fond, que dans la vie de la famille et le soutien indéflectible qu’elle apportait à son mari. Présentes sur tous les fronts, elles étaient les premières à relayer leurs hommes au moment des grandes grèves.
infirmières dans un dispensaire des mines
L’association souhaitait les mettre à l’honneur, et c’est entre autre pour cette raison aussi que nous avons choisi de construire un géant représentant une lampiste. A Evin-Malmaison la fosse 8 a vu de nombreuses femmes travailler au criblage, au triage, dans les services généraux, et à la lampisterie.
Ne méritaient-elles pas cet hommage ?
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On les placera dans les emplois demandant peu de force mais de la minutie et de la patience. Elles seront affectées au triage, au criblage, au moulinage, à la lampisterie mais aussi au chargement des wagons et péniches. Les femmes étaient toujours encadrées, malgré leurs postes à responsabilité (lampisterie), par des porions « hommes »!
Elles travaillent dans les mêmes conditions que les hommes jusqu’en
1875 et 1892. Les femmes ne travailleront plus au fond mais au jour.
En
1900 une nouvelle loi les place dans la catégorie du personnel protégé :
elles ne peuvent plus être employées plus de 10 h par jour entrecoupées
d’un ou plusieurs repos de plus d’une heure au total. Les compagnies
instaurent alors les postes de travail.
Mais les femmes ne travaillent pas longtemps à la mine. Bien souvent
elles ont la charge de leur enfant et laisse leur place à une sœur.
Elles se consacrent aux tâches ménagères mais soutiennent les actions de
leur mari notamment lors des grèves. C’est sous leur impulsion et leur
soutien que les grèves salariales eurent autant d’efficacité.
A la
nationalisation, les femmes ont été progressivement moins employées pour
les emplois d’ouvriers. Elles ont plutôt intégré les bureaux et les
salles de paye Les centres ménagers formaient les femmes de mineurs à la
gestion financière et matérielle du foyer. Un mineur bien en ménage est
un bon mineur!
1662 : Découverte en surface de traces charbonnières (Hardinghen)
1709 : Découverte de la fabrication de la fonte à partir du coke
1720 : Découverte du charbon (maigre) officielle à Fresnes sur Escaut
1734 : Première exploitation de charbons gras à Anzin
1757 : Création de la première Compagnie minière Anzin
1783 : Création de l’école royale des Mines
1810 : Loi sur les concessions minières
1813 : Le travail du fond interdit aux enfants de -10 ans
1823 : Le préfet du nord interdit de fumer au fond et généralise les lampes à huile.
1825 : Invention de la première lampe de sécurité par Davy
1835 : Première ligne de chemin de fer entre Saint Waast et Denain.
1841 : Découverte du charbon dans le Pas de Calais à Oignies
1847 : Descente du premier cheval
1878 : Création des Mines de Douai
1882 : Création de la chambre syndicale à Lens par Arthur Lamendin
1883 : Création de la chambre syndicale dans le nord par Basly
1885 : Zola sort Germinal
1890 : Arrivée des premiers délégués mineurs
1891 : Création de l’Union patronale des Houillères pour faire face à la colère salariale
1892 : Le fond est interdit au femme et première convention collective
1894 : Première caisse de secours
1906 : Catastrophe des Mines de Courrières 1099 morts
1910 : Journée de 8 heures
1918 : 103 fosses du bassin détruites
1920 : Arrivée du marteau-piqueur
1925 : Immigration de travailleurs polonais.
1936 : Grèves générales : deux semaines de congés payés et 38h40 de travail/semaine
1946 : Nationalisation des Compagnies minières et Création des HBNPC
1947 : Achat du château d’Hagecroft à la Napoule
1948 : Grandes grèves : les troupes libèrent les fosses
1963 : Mise en service de la fosse 10 d’Oignies dernier siège foncé dans le Nord Pas de Calais
1965 : Lancement de Anthracine 20 le boulet sans fumée des usines Rousseau
1966 : Diversification des houillères APEX crée pour développer la région et le SOFIREM pour la réorganisation de l’économie régionale
1971 : Les HBNPC commencent la rénovation de leurs cités
1974 : 42 morts à Liévin
1982 : Ouverture du CHM lewarde
1983 : Début de la conversion du bassin minier
1984 Création de FINORPA et FIBM
1986 : Les mineurs reclassés à EDF ou dans le bâtiment
1990 :Fermeture des deux derniers puits dont le 10 d’Oignies le 21 décembre 1990.
1991 : Dissolution des HBNPC
Les femmes descendaient au fond aux débuts de la mine. Après
l’interdiction législative du fond pour les femmes, elles sont occupées
au jour pour divers travaux dont celui de trieuses. On les appelaient
cafus ou mahus (Mines de Liévin) . Elles doivent ce nom à l’étoffe qui
entoure leur coiffe. Cette étoffe est destinée à protéger des poussières
et à maintenir la coiffure.
Le triage est l’action de séparation des
charbons des terres stériles. C’était un métier éprouvant sans cesse
debout avec la cadence infernale du convoyeur à bande. Le bruit, les
poussières, les mains abîmées sont les effets de ce travail. En plein
été, la chaleur les faisait suffoquer et en hiver leurs mains étaient
gelées par le froid. Il ne faut pas oublier tout ce que les trieuses
retrouvaient au milieu des charbons notamment les déjections fécales des
mineurs ayant fait leurs besoins dans les berlines au fond.
L’exposition
« Femmes de la mine, femmes de mineur » évoque une page de l’histoire
charbonnière rarement abordée : celle de générations de femmes du bassin
minier du Nord-Pas-de-Calais, élevées à l’ombre des chevalets, et
entièrement vouées à leur mineur de mari. Durant plusieurs mois, une
ethnologue, Dominique Le Tirant, a interrogé une quarantaine de femmes
de la région de Lens. Des femmes nées dans les années 1920 qui ont
égrené leurs souvenirs de l’après-guerre, quand les houillères
recrutaient largement et que les corons poussaient comme des
champignons.
De ces témoignages livrés en direct est née cette exposition émouvante sur les différents passages de la vie d’une femme, depuis son éducation jusqu’à son mariage, puis au rôle de mère de famille. De nombreuses photos et des films noir et blanc, puisés dans les archives des houillères du Bassin Nord-Pas-de-Calais, viennent compléter ces paroles de femmes.
De la préparation du « briquet » au coucher des enfants
On est alors en pleine reconstruction d’après-guerre et les houillères ont du mal à recruter les hommes nécessaires à la remise en état des installations de fond. De ce fait, les films tournés à l’époque se font volontiers propagandistes, vantant les « charmes » de la vie de mineur. Corons pimpants, enfants endimanchés dans les bras de leur père, jeunes mamans poussant d’énormes landaus dans les rues de la cité… La vie dans les mines telle qu’on ne l’avait jamais imaginée ! La réalité est plus prosaïque.
Entre fourneaux, lessive à la main, corvée d’eau dans la cour, courses à la coopérative et entretien du potager, la vie de femme de mineur laissait peu de place à la fantaisie. Levée la première pour chauffer l’eau et préparer le « briquet » du mari (à savoir, le pique-nique que le mineur emportait au travail), elle était la dernière couchée, après les différentes tâches ménagères. « On ne se rendait pas compte que notre vie était à ce point programmée ! remarque Marcelle, 70 ans, veuve de mineur. On ne sortait jamais de la cité, et l’on n’avait aucun point de comparaison avec d’autres sociétés. Avec le recul, je réalise que dès notre plus jeune âge, nous étions mises sur des rails… Conditionnées pour devenir femmes de mineur ! »
Pas d’amertume ni de regret dans le propos, juste un constat. Celui d’une vie entièrement dédiée à la mine. De l’école aux colonies de vacances, en passant par les cours d’éducation ménagère, les sorties en camping et les cours de composition de bouquets, toutes les activités des jeunes filles étaient régentées par les houillères. Le certificat d’études en poche, à l’âge de 14 ans elles prenaient le chemin de l’école ménagère où elles apprenaient à repasser, à bien tenir leur intérieur et à nourrir leur famille de façon « consistante ». Ensuite venait le temps de l’embauche, à 16 ans : au triage du charbon ou à la lampisterie. Des heures debout à trier le charbon défilant sur un tapis roulant, dans le bruit et la poussière, sous l’oeil sévère du contremaître. « A force de faire le même mouvement, je devenais bossue !, confie Hélène, trieuse. Nous devions essuyer nos yeux avec de l’huile pour enlever le charbon. »
L’angoisse de l’accident,
puis le temps de la silicose…
Le week-end, les jeunes filles allaient au bal, où elles rencontraient leur futur mari : « On n’avait pas le droit de se tromper ! Le premier était souvent le bon. » Une fois mariée, la fille de mineur était « remerciée » par les houillères et rentrait à la maison pour s’occuper du bien-être de son époux. Commençait alors sa vie de femme de mineur. Une vie austère, avec quelques bons moments : le café chez la voisine, seul instant de vraie liberté, et parfois les escapades à La Napoule, le centre de vacances des houillères, quand on avait la chance d’être tiré au sort. « C’était le rêve, la vie de château ! », se souvient Edouardine, encore émerveillée quarante ans après.
La vie de femme de mineur était aussi faite d’angoisse et de peur. « Je guettais la barrière… Et mon mari qui ne rentrait pas, se souvient Christine. Chaque fois, c’était l’angoisse. Il fallait prendre sur soi. » Les accidents et la maladie faisaient partie du quotidien. Rares sont celles qui n’ont pas perdu un mari, un père ou un frère à la mine. « La silicose, c’est le destin des mineurs », résume avec pudeur Christine.
Femmes de mineur, puis veuves de mineur : étrange destin que celui de toutes ces femmes du bassin minier. Nées à Lens plutôt qu’à Roubaix, elles ont épousé la mine plutôt que les filatures. Une vie toute tracée qu’elles n’ont pas vraiment choisie, mais qu’elles ont aimée malgré tout. A cause de la solidarité qui régnait dans les corons, et de l’amitié nouée avec les autres femmes. Une existence âpre et rude, qui avait aussi ses bons côtés.
Florence QUILLE
L’exposition
« Femmes de la mine, femmes de mineur » comporte deux volets : l’un sur le travail des femmes à la mine avec des conditions très dures et des salaires plus faibles que ceux des hommes, l’autre sur la vie des épouses de mineurs, avec reconstitution d’une cité minière (logement, estaminet) et présentation des différentes facettes de la vie quotidienne.
Centre historique minier, fosse Delloye, à Lewarde (Nord). Tél. : 03.27.95.82.82. En venant de Paris et de Lille direction Douai, puis Cambrai. Ouvert tous les jours de 9 heures à 17 h 30, jusqu’à fin décembre 2002.
Dans les premiers temps des mines, les femmes étaient employées sous
terre pour tirer les wagonnets de charbon. Par la suite, c’est
essentiellement en surface que l’on trouve les emplois féminins.
Les
trieuses : Pour la plupart, il s’agit de femmes ou de jeunes enfants qui
trient le charbon de la terre avant le chargement. Ce tri était fait à
l’origine avec une grande pelle et des paniers en osiers, puis ensuite
sur des tapis roulants. C’est un travail dur, demandant beaucoup de
résistance. Pourtant les femmes s’affairent par tous les temps,
chaussées de sabots et coiffées d’un fichu pour se protéger de la
poussière de charbon.
La femme, quand elle ne travaille pas à la mine, est toujours présente aux côtés du mineur. C’est elle qui se lève à 4 heures du matin pour préparer le café fort du mineur ; c’est elle qui prépare le briquet (casse-croûte) qu’il prendra à la pause ; c’est elle qui frottera son dos meurtri quand il se lavera dans le grand baquet au retour de ses 10 heures de fosse. C’est aussi la femme du mineur qui gère le budget du ménage. Ce sont également les femmes de mineurs qui entretiennent les grèves quand la situation devient trop difficile.
Les jeunes filles sont employées à la lampisterie, où elles remettent, en échange d’un jeton numéroté, la lampe aux mineurs qui descendent. Ce système permettait de savoir quel était le nombre de mineurs dans la mine et de connaître les manquants en cas d’accident.
Les enfants travaillaient très jeunes, en général vers 7 ou 8 ans (parfois, pour les embaucher plus jeune, on trichait sur leur âge ). On les affectait à de petites tâches mais pas moins dangereuses. A l’instar des femmes, les enfants sont toujours descendus très jeunes à la mine. Ils représentaient pour l’employeur une main-d’oeuvre bon marché, et pour la famille un appoint de revenu non négligeable. Chez les mineurs, pas de contrôle des naissances : les enfants se suivent, d’autant plus que la mortalité infantile est très importante. De plus la mine fait payer un lourd tribut à la famille (accidents, conditions de travail pénibles…). Ce n’est qu’en 1813 qu’une première loi interdit l’emploi des enfants de moins de 10 ans. Mais cette loi est peu respectée. Le galibot continuera à faire taire ses peurs d’enfant et, aux côtés d’un autre mineur, il passera par tous les postes de la mine pour apprendre le métier.
Plus tard, juste adolescent, il sera hiercheur, c’est-à-dire qu’il évacuera la houille et la terre, d’abord avec des paniers, plus tard en poussant des berlines. En 1804, un hiercheur conduit 21 douzaines de paniers de 120 kg par jour, soit un poids transporté de 30 tonnes sur 5 km.
Les mineurs étaient en général peu disciplinés, les bagarres n’étaient pas rare, et les mœurs n’existaient presque pas. Les femmes travaillant au fond subissaient souvent les “assauts” de leurs collègues masculins et/ou de leur chef. Les viols n’étaient pas rares et donc les enfants illégitimes non plus.
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