Belgique: bassin houiller de Charleroi, «le Pays Noir»
Des documents font mention d'exploitation du charbon dès le 13ème siècle à Gilly et à Charnoy (Charleroi). La présence de nombreux affleurements au nord du bassin est à l'origine des exploitations précoces et explique le morcellement des concessions, caractéristique des bassins wallons. C'est dans le bassin de Charleroi, au siège Sainte-Catherine des Charbonnages du Roton à Farciennes, que furent remontées les dernières berlines de charbon, le 29 septembre 1984.
Sources des différents textes : «Il était une fois, le Pays Noir» de Gérard Detillieu et «Le bassin minier de Charleroi et de la Basse-Sambre» par Roger Berwart
Charbonnage du Bois du Cazier - Marcinelle
L'origine du nom Bois du Cazier provient de l'union
conjugale de la propriétaire du Bon Bois de Marcinelle, avec le Baron de
Cazier, au 18ième siècle. Dès 1822, une mine y était exploitée, mais ce
n'est qu'en 1874 que le charbonnage prendra le nom de Bois du Cazier.
Après rachat par les Charbonnages d'Amercoeur en 1899, le Cazier devint
un des charbonnages les plus productifs et les plus modernes du Pays de
Charleroi. Le charbonnage connu deux graves accidents : en 1930, 16
mineurs y trouvèrent la mort suite à un coup de grisou; en 1956, ce sont
262 mineurs qui ne remontèrent jamais suite à la plus grave catastrophe
survenue en Belgique. En 1954, un nouveau puits fut foncé (puits
Foraky) mais après la catastrophe de 1956, ce puits fut condamné avant
même avoir fonctionné. Le charbonnage ferma ses portes le 15 janvier
1961. En 1963, on remit en fonction partiellement l'exploitation du Bois
du Cazier pour fermer définitivement le 9 décembre 1967.
La catastrophe du 8 août 1956
Suite
à une erreur de manipulation, un incendie éclate au fond du puits et se
propage dans la mine. La cage se présente à l'étage 975 et s'y arrête,
alors qu'elle n'était pas destinée à cet étage. Le préposé, pensant que
cette cage était pour lui y encage une berline remplie de charbon, aux
alentours de 8 heures 10. Normalement, un wagonnet rempli en chasse un
vide dans la cage du puits. Suite à une défaillance, le wagonnet rempli
entre partiellement dans la cage, et le vide n'est pas entièrement
chassé. Avant d'avoir pu évacuer l'une des deux berlines, la cage
remonte soudainement vers la surface. L'un des deux wagonnets se heurte
violemment contre une poutre, celle-ci arrachant deux câbles électriques
à haute tension, les câbles téléphoniques, une conduite d'huile sous
pression, et les tuyaux d'air comprimé. L'arc électrique formé par les
câbles à haute tension est en contact avec la conduite d'huile
sectionnée, provoquant un incendie, attisé par l'air comprimé qui
s'évacue suite aux dégâts occasionnés aux tuyauteries par les berlines.
Le feu attaque les boiseries de la mine, et rapidement, l'incendie se
propage dans les galeries. Une épaisse fumée noir s'évacue par le second
puits. L'air dans la mine devient de moins en moins respirable, et le
monoxyde de carbone envahit la mine. Les deux puits ne peuvent plus être
utilisés par les secours, l'un bloqué par la cage, l'autre par la fumée
de l'incendie. 274 mineurs sont à ce moment dans la mine, répartis
entre les étages allant de -170 à -1035. 262 mineurs de 12 nationalités
différentes eux furent retrouvés morts.
Aujourd'hui le site abrite un
musée ; les deux chevalements métalliques ont été restaurés, la plupart
des bâtiments du carreau ont été conservés, à l'exception
malheureusement de la tour d'extraction du puits Foraky.
Charbonnages du Gouffre, siège n°10 - Châtelineau
Des documents montrent des traces d'exploitation de la
houille à Châtelineau vers 1611. En 1778, paraît l'acte constitutif
d'une société pour l'exploitation de la veine «le Gouffre». Par la
suite, en 1835, se fondait la Société Anonyme des Hauts-Fourneaux,
Usines et Charbonnages de Châtelineau, qui fusionna en 1866 avec la
Société Anonyme des Hauts-Fourneaux, Usines et Charbonnages de
Marcinelle et Couillet. La société des charbonnages du Gouffre devint
autonome le 18 février 1882. Elle possédait 10 sièges d'extraction mis
en service entre 1827 pour le n°1 et 1916 pour le n°10. En 1929, la
production s'élevait à 333 000 tonnes pour un personnel de 1458 ouvriers
; puis elle fut de 480 000 tonnes pour 1723 ouvriers en 1956. Son
dernier puits en activité fut le n°7 qui ferma le 15 mai 1969.
Le
siège n°10 fut le dernier mis en service en 1916, mais les rendements ne
furent jamais très bons. En 1963, ce siège n'enregistra qu'une
production de 83 000 tonnes. Il ferma ses portes le 31 mars 1969, peu de
temps avant le n°7. Aujourd'hui, la plupart des bâtiments datant de
1934, amputés des 2 chevalements et des machines d'extraction, sont
encore visibles sur les hauteurs de Châtelineau. Une partie du site est à
l'abandon, fortement dégradée, tandis qu'une entreprise occupe le reste
des bâtiments.
Charbonnages de Monceau-Fontaine
Monceau-Fontaine fut, et de loin, la plus importante
société du bassin. Son histoire est une longue série de fusions et
d'annexions. C'est en 1807 qu'une première société fut fondée regroupant
un certain nombre de cayats mais ce n'est que 29 ans plus tard que l'on
trouve pour la première fois le nom actuel de la société. Le 9 juin
1836 était en effet constitué la Société de Monceau-Fontaine appartenant
à la Société Générale de Belgique. Chose étonnante pour l'époque et
pour la région de Charleroi : sa concession s'étendait déjà sur une
superficie de plus 1700 hectares. Depuis cette date, il n'y eut pas
moins de dix extensions et annexions amenant la société à contrôler à
partir de 1948 une concession de 7260 hectares et à devenir le premier
producteur belge de houille. Entre temps, du 7 février 1852 au 17
janvier 1908, la Société de Monceau-Fontaine s'était appelée «Société
Anonyme des Charbonnages de Monceau-Fontaine et du Martinet»», par
l'annexion de la Société des Charbonnages du Martinet faillie en 1850,
rachetée en vente publique le 10 mai 1851 par un certain Ferdinand
Spitaels puis finalement cédée à Monceau-Fontaine le 7 février 1852.
C'est le 17 janvier 1908, lors de l'annexion de la S.A. du Charbonnage
de Marchiennes, qu'elle reprit son appellation définitive de S.A. des
Charbonnages de Monceau-Fontaine. Après la dernière absorption, celles
des Charbonnages du Nord de Charleroi en 1948, la concession s'étendait
sur 25 localités et la distance à vol d'oiseau entre deux sièges
extrêmes, le n°17 à Piéton et le n°25 à Couillet était de 16 km. En
1953, la société occupait environ 10 000 personnes et produisait 1 750
000 tonnes de houille.
La société possédait 7284 hectares sous 25
localités. Comme toutes les autres, elle commença alors à fermer ses
puits. Le n°10 de Forchies ferma en septembre 1958, le n°24 le 1er
janvier 1959, le n°10 de Forchies reprit du service au début de l'année
1965 mais ferma définitivement ses portes le 5 mars 1966. Le n°23 «le
Cerisier» s'arrêta en juillet 1966, le n°6 «Périer» en janvier 1967, le
n°14 au mois d'août 1972, le 25 «le Péchon» le 31 mars 1975, le n°18
«Parent» le 31 mars 1978. Un an plus tard, ce fut le tour du n°19
«Bas-Long-Pré». Cette longue agonie se termina le 31 mars 1980 avec la
fermeture du n°17 à Piéton, dernier puits encore en exploitation de la
société. Entre temps le n°25 à Couillet avait enregistré en 1972 ce qui
fut la dernière catastrophe minière en Belgique : un dégagement
instantané de
grisou tuait 6 mineurs.
Il ne reste à l'heure actuelle que peu de
vestiges de ce puissant ensemble. Entre Monceau-sur-Sambre et Roux, on
peut encore voir quelques bâtiments du siège n°4 «Martinet» qui fut l'un
des plus importants de la compagnie, jusqu'à sa fermeture le 15 avril
1967. Les puits furent cependant maintenus en état de fonctionnement
jusqu'en 1979, année de fermeture du n°19. A notez qu'en 1929 fut
construit derrière le Martinet un gigantesque triage-lavoir utramoderne
devant traiter les produits provenant de tous les sites d'extraction. Le
triage lavoir central (TLC) fut fermé le 31 mars 1980 ; il n'en reste
plus rien.
Toujours à Monceau-sur-Sambre, subsiste un chevalement en
béton armé datant des années 20, équipé de ses molettes et ayant
appartenu au siège n°3 dit «Fosse du Bois» ou «Petit Martinet» fermé le
15 juillet 1972. Un peu plus loin, il reste un bâtiment de machine
d'extraction ayant appartenu au siège n°3 Nord de Charleroi, reconverti
en bergerie.
Enfin, à Couillet, on peut encore voir les deux
imposants chevalements métalliques du siège n°25 appelé aussi «Péchon»
fermé le 31 mars 1975. Le site, classé, a été acquis par la région
wallonne en 1984. La restauration des chevalements entamée la même année
a été rapidement abandonnée. Ces derniers sont aujourd'hui en très
mauvais état et dressent leurs silhouettes sur une aire dénudée, vaste
terrain de jeux pour les enfants du voisinage.
Charbonnage du Roton - Farciennes
Les premiers droits d'exploitation datent de décembre
1792. La concession du Roton s'étendait sur 76 hectares, celles de
Sainte-Catherine sur 333 hectares. En 1816, une autre concession vint
s'ajouter. Une société fut constituée le 24 avril 1821 et l'année
suivante, un acte apportait une 4ème concession. En 1890, la société du
Roton se rattachait à la société du charbonnage d'Oignies-Aiseau et se
mua en S.A. des Charbonnages Réunis de Roton-Farciennes, Baulet et
Oignies-Aiseau. Suite à un litige avec la société du Petit-Try, la
société vendit la concession de Baulet en 1906. Elle prit alors le nom
de S.A. des Charbonnages Réunis de Roton-Farciennes et Oignies-Aiseau.
En novembre 1926, elle reprenait la concession du charbonnage de
Falisolle mis en liquidation. La division du Roton-Farciennes possédait
deux sièges : le siège des Aulniats et le siège Sainte-Catherine.
Celui-ci fut le dernier charbonnage en activité en Wallonie, il ferma le
30 semptembre 1984.
Il s'agissait du charbonnage le plus moderne de
toute la Wallonie. L'histoire contemporaine du site débuta en 1955,
lorsque le conseil d'administration de ce charbonnage décida de faire de
gros investissements et de transformer le siège de Sainte Catherine en
exemple de modernité et extraire 30 000 tonnes de charbon chaque jour.
Cent millions d'anciens francs belges avaient été mis sur la table. Un
nouveau puits était foncé et équipé d'une tour d'extraction. Enfin, un
nouvel étage d'exploitation s'ouvrait à 718 mètres sous la terre. Dans
les années 60, ils étaient plus de 3 000 mineurs à venir tous les jours
sur le site Sainte Catherine pour y travailler et exploiter le charbon.
La
tour d'extraction fut préservée et se dresse aujourd'hui au milieu de
l'ancien carreau dont la plupart des bâtiments ont été détruits. Un peu
plus loin, on peut encore apercevoir de la route les vestiges du
triage-lavoir, réutilisés par la société Roton Environnement.
Houillères d'Anderlues - Anderlues
La Société houillère du Bois de la Haye fut créée en
1857 à Béthune (Nord de la France). Mais son champ d'exploitation se
situait à Anderlues. En 1860, à Arras (France), fut fondée la Société
Charbonnière du Midi d'Anderlues, visant également l'exploitation à
Anderlues. En 1867, les deux sociétés fusionnèrent et prirent alors le
nom de S.A. des Houillères d'Anderlues avec une concession d'une
superficie de 1039 hectares. Le fonçage du puits n°1 fut commencé le 17
septembre 1958 et le n°2, le 25 septembre de la même année. Le puits n°3
fut entrepris le 11 novembre 1868. Ce siège n°3, dit de l'Aulniat, fut
le témoin le 11 mars 1892, d'une importante catastrophe qui fit 160
victimes suite à un coup de grisou. En 1890, le puits dit «Gendebien»
fut repris par la société, et pris le nom de puits n°4. En 1894, la
création du siège n°5 fut décidée et le 5 mars 1925, la société obtint
une extension de la concession de 620 hectares.
En 1930, l'extraction
se faisait par 3 puits : les n°2, 3 et 5. Le n°1 servait pour l'aérage
et le n°4 était inactif. En 1956, la société employait 1600 ouvriers. Le
dernier siège en exploitation fut le n°6, construit en 1937 ; il ferma
le 5 septembre 1969. Il est aujourd'hui le dernier chevalement encore
debout des houillères d'Anderlues. Il fut réaménagé pour le stockage du
gaz naturel par la société Distrigaz.
Parmi les autres vestiges
visibles début 2011, il ne faut pas oublier la cokerie, construite en
1903 et modernisée par une nouvelle batteries de fours à coke en 1931.
Fermé en 2002, le site, l'un des plus pollués de Belgique, est à
l'abandon et attend son triste sort.
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